Batteries au lithium, problèmes et perspectives par Yves Chabre (15 janvier 2008)

Yves Chabre, physicien, chercheur CNRS retraité, est actuellement consultant pour les entreprises et effectue des missions en Chine.

Compte rendu rédigé par Jérôme Bordier

L'exposé a porté sur l'état de l'art de la recherche et de la technologie actuelle, l’ évolution prévisible et les principales utilisations. Le compte rendu suivant est un résumé portant sur les aspects industriels, économiques et environnementaux des batteries.
La partie scientifique et technique, très riche, ne peut pas être résumée en quelques lignes.
Yves Chabre nous fournira prochainement ses transparents commentés.

Les principaux défauts reprochés aux batteries sont:
- pas assez d'autonomie
- temps de recharge trop long
Le problème de la sécurité s'est posé récemment de manière spectaculaire: qui n'a vu sur internet des photos d'ordinateurs portables détruits ?
Les efforts des chercheurs et des industriels portent sur l'amélioration des performances et de la sécurité.
Les piles et batteries au lithium sont les plus répandues. En Chine les gros fabricants de batteries pour téléphone portable sortent 4 à 5 millions d'unités par jour !
Pourquoi le lithium ? Ce métal se ionise facilement (forte électropositivité).
Les piles de montre sont basées sur la technologie lithium-métal, réaction chimique à potentiel constant, non réversible.
Les batteries de téléphone utilisent la technologie lithium-ion avec un électrolyte non aqueux (sel de lithium + solvant organique, réaction réversible).
Le principe de la batterie lithium-ion a été inventé en 1980 conjointement par Michel Armand, chercheur grenoblois, actuellement directeur de recherche CNRS dans un laboratoire de l'Université de Picardie, et Bruno Scrosati, professeur à l'université La Sapienza de Rome. La première commercialisation date de 1991 (Sony).

Sécurité des batteries
Les études ont montré que les cas d'incendie sont dus à un défaut du système de contrôle électronique qui provoque un échauffement des éléments beaucoup plus que des batteries elles-mêmes. Les défauts de fabrication des batteries sont rares (en moyenne une sur un million).
Pour les différents types de technique utilisée pour les électrodes:
- les composés à structure lamellaire sont exothermiques (donc risque d'incendie)
- les composés à structure 3D sont plus stables
On recherche donc les composés les plus stables thermiquement. Le plus prometteur est le phosphate de fer (pas de métaux rares, non toxique, non inflammable).

Fabrication des batteries
2 formes : cylindrique ou "soft package" (enveloppe métallique plate).
Pourquoi métallique ? parce qu'il n'existe pas de matière plastique qui soit à la fois imperméable à l'eau et à l'air.
Contrôle de qualité: nombre impressionnant de contrôles. Le montage du boîtier est contrôlé aux rayons X afin que les distances nominales entre les différentes couches soient bien respectées.
Importance du circuit de contrôle (BMS=battery management system).
A noter que les batteries au lithium subissent après fabrication trois cycles complets de charge-décharge afin de leur assurer le fonctionnement le plus stable possible.
Yves Chabre a visité des usines lors d'une mission en Chine. La plupart des batteries sont fabriquées manuellement par des jeunes chinoises assujetties à des conditions de travail très rudes. L'automatisation progresse cependant.

Utilisation des batteries
En dehors de la téléphonie mobile et des ordinateurs, le domaine qui s'est le plus développé est l'outil portatif professionnel qui apporte une plus grande efficacité et sécurité, mais avec l'inconvénient d'une durée de vie de 6 mois des batteries en raison de l'usage très intensif.
Le secteur susceptible de développement est celui du transport collectif et individuel (autobus, automobile électrique ou hybride, vélo à assistance électrique), l'objectif étant de réduire la pollution en ville.
Il n'y a pas que le CO2 nous dit Yves Chabre : pour chaque litre d'essence consommé il faut compter aussi la quantité d'oxygène utilisée, la vapeur d'eau dégagée (impact sur l'effet de serre) et savoir que, au final, seulement 20% de l'énergie consommée aura servi à la propulsion du véhicule.

Impact sur les ressources et recyclage
Les batteries utilisent des métaux rares. Le plus critique est le cobalt dont les réserves mondiales sont évaluées à 15 ans au rythme actuel. La seule solution pour ces ressources rares est la récupération. Le futur est du côté des batteries lithium-phosphate de fer pour les raisons indiquées précédemment.
Contrairement aux batteries classiques au nickel., le recyclage du lithium est difficile. Le broyage entraîne un échauffement. II faut refroidir (donc consommation d'énergie supplémentaire). Les piles au mercure doivent être même broyées sous azote liquide !
Un laboratoire grenoblois a mis au point une méthode électrochimique pour récupérer le lithium (société Recupyl créée par l'INPG).

Avenir
Même si des questions se posent sur les gains encore possibles, la technologie des batteries atteint ses limites.
Conséquence: il faut diminuer la consommation des ordinateurs portables. Un premier exemple est la suppression du disque dur (solution coûteuse à l’achat aujoud’hui).
On a beaucoup parlé de la pile à combustible, mais le cycle de l'hydrogène est très coûteux.
Aspects nanométriques: des électrodes "nano conditionnées" sur une structure de cuivre se sont révélées trés performantes.
Si les voitures électriques se développent en Europe il faudra construire les batteries sur place en raison de leur poids prohibitif pour leur transport depuis la Chine.

Conclusion
Un excellent exposé, clair et pédagogique. Nous n'avons pas eu le temps d'approfondir la problématique de la durée de vie des batteries, ni celle de la récupération et du recyclage.